A l'origine de la ville de Sparte, nommée également Lacédémone, se trouve le regroupement, au IXe siècle, de quatre villes d'origine dorienne. Guerrière, la cité conquière d'abord le bassin inférieur de l'Eurotas, afin d'avoir un accès à la mer, puis la Laconie. Mais au VIIIe siècle, c'est la poussée démographique qui entraîne la recherche de nouvelles, et la conquête de la Messénie, voisine.
La société
spartiate se divise en trois classes bien définies. Tout en haut de l'échelle
se trouvent les Spartiates natifs, ou homoioi - les Egaux -; ils
sont citoyens, servent dans
l'armée et sont les seuls à disposer de tous les pouvoirs légaux politiques.
Viennent ensuite les hypoméiones, les inférieurs, et les périèques,
littéralement "ceux qui habitent autour". Les premiers regroupent les
Spartiates déchus ou frappés d'atimie - pour avoir failli au combat - , ou
encore les enfants illégitimes; les seconds les étrangers, habitants de la
Laconie et des environs, qui sont soumis à l'État spartiate, n'ayant donc pas
de droits mais libres!
Les hilotes sont des esclaves agriculteurs originaires des régions conquises par la
guerre, comme par exemple les habitants de la Messénie.
Une des plus belles et des plus heureuses choses que Lycurgue
introduisit dans sa cité fut de garantir à ses citoyens leur temps libre, ne leur
permettant pas d’exercer un métier quelconque. Il ne leur était pas nécessaire
de travailler pour amasser de grandes richesses dans un lieu où l’opulence
n’était ni utile ni appréciée: car les hilotes, qui étaient réduits en
esclavage par le droit de la guerre, leur labouraient leurs terres et leur
procuraient un revenu tous les ans.” Plutarque
La structure sociale de l'Etat spartiate fut mise en place
dès le IXe siècle:les citoyens possédaient
chacun un kleros,
lot de la terre conquise, cultivé par les vaincus asservis, les hilotes.
Toutefois les terres les
plus éloignées n’étaient pas confisquées et leurs propriétaires, les
périèques, demeuraient libres dans leurs biens et leur personne.
Afin de satisfaire le
mécontentement des citoyens pauvres, lors de la crise d'après-guerre de Messénie,
Lycurgue, législateur qui fixa les institutions politiques à Sparte, eut
recours à la distribution des terres. Celle-ci, contrairement à Athènes, se
fit sans changement de lois. Propagande sur la valeur morale de la
collectivité, du mérite personnel de ses membres, qui prône l'égalité
absolue de tous les citoyens. On distingue deux catégories de terres: la terre
périèque et la terre civile.
Dans le but de bannir l’insolence, l’envie,
l’avarice, le luxe, la richesse et la pauvreté, Lycurgue persuada les
Spartiates de mettre en commun toutes les terres et de réduire toutes les
fortunes au même taux. [...] Ainsi, personne n’étant plus riche que son
voisin, la différence doit se faire par le blâme des choses déshonnêtes et
la louange des choses honnêtes. Il divisa les terres de Laconie en trente mille
parts qu’il distribua à ceux de la campagne, et il fit neuf mille parts de
celles du territoire de Sparte; car c’était là le nombre des citoyens appelés
au partage. (...) Chacune de ces parts pouvait rendre à son maître chaque année
soixante-dix médimnes d’orge pour l’homme, douze pour la femme, ainsi que
du vin et de l’huile.” Plutarque, Lycurgue, VIII
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Dans l'histoire de la
Grèce antique, c'est le gouvernement le plus fixe.
A l'origine il s'agit d'une double monarchie, deux rois sont en effet
placés nominalement à la tête de l'État. Les deux lignées royales sont les
Agides et les Eurypontides. Mais à la fin des VIIIe-VIIe siècle,l'aristocratie
s'assure le contrôle du pouvoir: les rois font l'objet d'une surveillance
constante de la part des éphores, le reste du peuple quant à lui n'a aucun
réel pouvoir. Il s'agit alors d'une sorte d'oligarchie.
Les éphores sont les véritables
gardiens de la constitution. Ils sont composés de cinq magistrats élus pour un
an parmi les hommes du peuple. Ils veillent au respect des lois, surveillent les
souverains, la police, les mœurs et l’éducation des enfants; en temps de guerre ils
donnent l’ordre de mobilisation et dictent aux officiers la stratégie à
adopter.
Leur autorité ne cesse
de se renforcer, au détriment du pouvoir monarchique et de celui de l’Apella.
La souveraineté démocratique
s’exerce à l’Apella, assemblée composée des Egaux, citoyens libres
de plus de trente ans. Les Egaux dominent la cité. Ils sont en effet les
seuls à détenir les droits civils et politiques, la souveraineté électorale
et l’accès à la fonction d’éphèbe à partir de trente ans, car nés de
parents spartiates, ils disposent d’un kléros,
avec des hilotes, et ont participé au système éducatif obligatoire de la cité,
l'agogée.
L’Apella se réunit
environ une fois par mois, en plein air. Les lois sont votées par acclamation,
mais l’éphore qui préside a le droit d’interrompre les discussions afin
d’orienter les votes. Son pouvoir demeure quand même important car des
propositions contraires à la constitution peuvent entraîner sa dissolution.
La gérousia, ou Conseil
des Anciens, est une puissante assemblée aristocratique. Ce Sénat est composé
de vingt-huit Spartiates de plus de soixante ans élus à vie, les gérontes.
La révolte des hilotes de Messénie brisa l’expansion spartiate.
Dans ses relations extérieures
Sparte se contenta d’une politique de non-intervention, absorbée dans la défense
de ses conquêtes et tranquillisée par la création de la ligue
péloponnésienne. Sparte conclut en
effet une série d’alliances militaires avec un certain nombre de cités
arcadiennes, dans le but d’isoler Argos, de stabiliser les conquêtes
territoriales, et de prévenir toute rébellion dans la Messénie.
Du IVe au IIe siècles,
Sparte, affaiblie et en crise, ne résista pas à Philippe, qui la réduisit à
la Laconie.
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Sparte est soucieuse
avant tout de former des soldats, ainsi l’éducation intellectuelle est
mise de côté. Cette dernière est naturellement contrôlée par la cité.
Dès sa naissance l’enfant garçon est présenté aux anciens de la tribu qui
apprécient son état physique et décident du bien-fondé de sa survie:
Quand un enfant lui naissait, le père n’était pas maître de l’élever:
il le prenait et le portait dans un lieu appelé leschè, où siégeaient les
plus anciens de la tribu. Ils examinaient le nouveau-né. S’il était bien
conformé et robuste, ils ordonnaient de l’élever et lui assignaient un des
neuf mille lots de terre. Si, au contraire, il était mal venu et difforme, ils
l’envoyaient en un lieu appelé les Apothèques qui était un précipite du
Taygète. Ils jugeaient en effet qu’il valait mieux pour lui-même et pour
l’Etat de ne pas le laisser vivre, du moment qu’il était mal doué dès sa
naissance pour la santé et pour la force.” Plutarque
Et comme le constate le poète Poseidippos “Chacun, même s’il est pauvre, élève un enfant mâle;
une fille, même s’il est riche, il l’expose.”
Les nourrices participaient également à cette éducation ; tout est fait pour endurcir
le plus rapidement le jeune citoyen.
«De là vient aussi que les femmes ne lavaient pas les nouveau-nés
avec de l'eau, mais avec du vin : elles voulaient ainsi éprouver leur
constitution. Les nourrices, de leur côté, étaient soigneuses et expertes :
au lieu d'emmailloter les bébés qu'elles élevaient, elles laissaient entièrement
libres leurs membres et tout leur corps ; elles les habituaient à n'être point
difficiles ni délicats sur la nourriture, à ne pas s'effrayer des ténèbres,
à ne pas craindre la solitude, à s'abstenir des caprices vulgaires, des larmes
et des cris. » Plutarque
A 7 ans il entre dans la vie militaire, et à 12 ans il vit en caserne, subissant des épreuves
d’endurance (rien à voir avec l’éphèbe athénien):
"Elevés en commun sous la même discipline, ils n’apprenaient que
l’indispensable; tout le reste de leur instruction consistait à savoir obéir.
(...) On leur rasait la tête, on les habituait à marcher sans chaussures et à
jouer ensemble, la plupart du temps tout nus.
A l’âge de douze ans, (...) ils dormaient ensemble par troupes et par
section, sur des paillasses qu’ils préparaient eux-mêmes en cassant avec
leurs mains, sans aucun outil, les extrémités des roseaux qui croissaient le
long de l’Eurotas (...).
On ordonne aux plus forts d’apporter du bois, aux plus petits des légumes;
et ce qu’ils apportent, ils l’ont dérobé. Celui qu’on surprend est puni
du fouet et forcé de jeûner.
(...) On dit qu l’un d’eux, ayant dérobé un petit renard qu’il cachait sous son manteau, se laissa déchirer le ventre par les
ongles et les dents du renard afin de dissimuler son larcin et tint bon jusqu’à
la mort." Plutarque
Les mots d’ordre sont "Obéir, supporter, vaincre".
"Pour qu’ils ne fussent pas trop pressés par la faim, il leur permit,
non pas de prendre sans peine ce dont ils avaient besoin, mais de dérober
certaines choses pour satisfaire leur appétit. Et ce n’est point parce
qu’il était embarrassé de les approvisionner qu’il leur permit de se
procurer leur subsistance par d’industrieux artifices - il n’est, je pense,
personne qui l’ignore -, mais il est clairque celui qui veut voler doit
veiller la nuit, ruser et tendre des pièges le jour et avoir des espions sous
la main, s’il veut prendre quelque chose. Il est évident que toutes ces
prescriptions avaient pour but de rendre les enfants plus adroits à se procurer
le nécessaire et plus propres à la guerre." Xénophon
Comme symbole de cette éducation à la spartiate on peut citer la cryptie, apprentissage au meurtre
qui se fait sur les hilotes.
" Voici en quoi consistait la cryptie. Les chefs des jeunes gens envoyaient
de temps à autre dans la campagne, tantôt ici, tantôt là, ceux qui passaient
pour être les plus intelligents, sans leur laisser emporter autre chose que des
poignards et les vivres nécessaires. Pendant le jour, ces jeunes gens, dispersés
dans des endroits couverts, s'y tenaient cachés et se reposaient ; la nuit
venue, ils descendaient sur les routes et égorgeaient ceux des hilotes qu'ils
pouvaient surprendre. " Plutarque
Plutarque décrit longuement cette chasse à l’homme qui se pratiquait la nuit avec des
poignards. Il cite le passage où Thucydide rapporte comment des hilotes, sélectionnés
par les Spartiates pour leur courage, crurent qu’ils étaient libres et se
mirent une couronne sur la tête pour faire le tour des sanctuaires. On les
aurait fait disparaître, au nombre de deux mille. En temps ordinaire, on les
traitait méchamment: on les forçait à boire du vin pur, pour les exhiber
ivres et apprendre aux jeunes ce qu’était l’ivresse, et on les forçait à
danser et à chanter grotesquement, pour les tourner en dérision.
Certains jeunes gens moururent sous le fouet, lors de ces fêtes en l’honneur
d’Artémis où ils devaient voler sur l’autel de la déesse, sans se faire
prendre, le plus de fromages possible. Le titre de “vainqueur de l’autel”
était valorisant comme celui qu’on donnait aux vainqueurs des concours.
" Chez les Spartiates, les garçons étaient frappés à coups de fouet
toute une journée sur l’autel d’Artémis Orthia, souvent presque
jusqu’à la mort, et supportaient cette épreuve avec gaîté et
orgueil, rivalisant les uns avec les autres pour la victoire, à celui d’entre
eux qui supporterait d’être battu le plus longtemps et qui recevrait le
plus grand nombre de coups. Celui qui l’emportait était tenu en toute
particulière estime. On appelait ce concours « la flagellation » et il
avait lieu chaque année " Xénophon
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C’est une vie de discipline, de reniement de soi et de simplicité - ils ne s’encombraient pas
de luxe, de nourriture coûteuse ou d’opportunités de richesse.
" Tout d’abord, ayant ôté toute valeur à la monnaie d’or et
d’argent, il décida qu’on n’emploierait plus que la monnaie de fer, à
laquelle il ne fixa qu’une faible valeur pour un poids et un volume
importants. Ainsi, celui qui recevait une somme de dix mines avait besoin
d’une grande salle chez lui pour la ranger et d’un attelage pour la
transporter " Plutarque
L’idéologie spartiate
était orientée autour de l’état. De vingt à soixante ans le citoyen
spartiate est au service de l’État, il mène une vie militaire.
Ainsi le soldat
spartiate se mariait mais ne vivait pas avec sa femme. C’est seulement à l’âge
de trente ans que le Spartiate devient un Egaux et a le droit de vivre
dans sa maison avec sa famille, tout en continuant à servir dans l’armée. Le
service militaire ne s’achevait que lorsqu’il atteignait l’âge de
soixante ans.
Cette longévité du
service militaire se comprend par le peu de Spartiates dans la population, par
rapport aux non citoyens.
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Même si les femmes ne
participaient pas à l’entraînement militaire, les mêmes valeurs
fondamentales se retrouvaient dans leur éducation. Par exemple elles avaient également
un entraînement physique et gymnastique.
" Les autres Grecs veulent que les jeunes filles vivent comme la plupart
des artisans, qui sont sédentaires, et qu'elles travaillent la laine entre
quatre murs. Mais comment peut-on espérer que des femmes élevées de la sorte
aient une magnifique progéniture ? Lycurgue, au contraire, pensa que les
esclaves suffisaient à fournir les vêtements, et, jugeant que la grande
affaire pour les femmes libres était la maternité, il commença par établir
des exercices physiques pour les femmes, aussi bien que pour le sexe mâle ;
puis il institua des courses et des épreuves de force entre les femmes comme
entre les hommes, persuadé que si les deux sexes étaient vigoureux, ils
auraient des rejetons plus robustes. " Xénophon
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