Hypatia, au travers de la littérature

C- Synésios de Cyrène

" Quand bien même, lui écrit-il, nul souvenir ne resterait aux Morts dans les Enfers, moi je m’y souviendrais de ma chère Hypatie. "

Il nous reste sept lettres, qui toutes sont adressées à la Philosophe. Elles témoignent toutes de la vive tendresse et de la constante gratitude que Synésios, durant toute sa vie, même lorsqu’il eut assumé les charges épiscopales, ne cessa de porter à la docte Hypatie. Après la mort de ses enfants, le père éploré se consolait en écrivant à la Muse, gardienne des traditions hellénistiques, " qu’elle était avec la vertu, l’unique refuge et l’unique bien qu’il lui restait " ? (lettre 154)

" sa vénérable maîtresse, sa mère, sa sœur, et celle à qui il devait tant de bienfaits, qu’elle méritait de sa part tous les titres d’honneur "

La correspondance avec Synésios de Cyrène, son élève le plus connu, païen converti au Christianisme, néoplatonicien, montre qu’il n’y avait apparemment pas de conflit notable entre Hypatie et les leaders de la ville ou de l’Église.

Bien que converti au Christianisme, Synésios entretient de longs et affectueux liens avec Hypatie, son mentor. On peut donc y voir une sort de négation des rapports conflictuels entre cette dernière et la nouvelle religion de l’État.

Il voua une admiration sans borne à celle qui le guida sur les chemins de la connaissance, et qui après conserva pour lui d’affectueux sentiments. C’est à son engagement en tant que philosophe qui tenta de repousser encore et toujours plus loin les limites de l’inconnu intellectuel, qu’il rendit hommage et loua pendant toute son existence.

Lettre XVI : A LA MÊME (à la Philosophe)

Je suis alité pour te dicter cette lettre, mais j’espère que tu seras en bonne santé quand tu la recevras, toi qui est ma mère, ma sœur, mon maître et, à tous ces titres, ma bienfaitrice, l’être et le nom qui me sont les plus chers au monde ! Ma faiblesse physique a une cause psychique : peu à peu me consume le souvenir de mes petits enfants qui m’ont quitté. La vie ne valait la peine d’être vécue, pour Synésios, qu’aussi longtemps qu’il n’éprouvait pas les malheurs de l’existence. Depuis, ce sont, pour ainsi dire, des flots contenus qui se sont déversés en masse, et mon existence a perdu sa douceur.
Je voudrais mettre un terme à ma vie, ou bien au souvenir des funérailles de mes fils ! Mais toi, je te souhaite en bonne santé. Salue tes bienheureux compagnons, ton père Théoteknos et ton frère Athanasios d’abord, puis tous les autres. Et s’il s’y est ajouté un nouveau venu qui t’agrée, je dois lui rendre grâces de t’agréer ; adresse-lui mes salutations comme au meilleur ami de mes amis. Si tu te soucies un peu de mon état, tu agis bien ; mais si tu ne t’en soucies pas, moi, je ne m’en soucie plus du tout.


Note : une tentation de suicide avait déjà saisi Synésios lors du décès de son premier fils.

D- L’Encyclopédie Suidas

D’après cette source Hypatie était mariée, ce qui est faux. On remarque la célèbre anecdote de la serviette hygiénique qu’elle jeta à la tête d’un de ses élèves tombé amoureux d’elle. La version de sa mort accréditée ici est celle par les moines.

E- Baronius (XVIe)

Baronius était un cardinal et un historien italien (Sora, 1538 – Rome, 1607). Disciple de Philippe Neri, il lui succéda comme supérieur de l’Oratoire, devint confesseur du Pape Clément VIII, cardinal (1596) et bibliothécaire de la Vaticane (1597). Il est l’auteur d’ « Annales ecclésiastiques » (jusqu’en 1198).

"Socrate rapporte qu'il y eut cette annee [415] en Alexandrie de grandes séditions, excitees par les Juifs, que sainct Cyrille avoit chassez de cette ville, dans laquelle ils avoient demeuré depuis Alexandre le Grand, & que cela fut cause de grandes inimitiez entre sainct Cyrille, et Oreste Gouverneur de la ville, lesquelles augmenterent la sedition dans la ville, à cause des Moines de Nitrie, qui estoient venus en trouppe, afin de combattre pour sainct Cyrille, & avoient blessé, & ignominieusement traitté Oreste, que le peuple defendit, & chassa les Moynes: & enfin Hypatie femme tres-renommee, & qui surpassoit en doctrine tous les Philosophes de ce temps-là, à laquelle Synesius écrivit plusieurs lettres, qui restent encore, dans lesquelles il l'appelle sa Dame, & sa Maitresse, & de laquelle Suidas fait estat, comme d'une vierge tres chaste, fut tuee, mise en pieces, & bruslee par les partisans de sainct Cyrille, à cause qu'on la soupçonnoit de destourner Oreste, de se reconcilier avec sainct Cyrille. Surquoy il faut prendre garde, que Socrate qui raconte cette histoire plus au long estoit Novatien: si bien qu'il n'écrit pas trop équitablement de sainct Cyrille, lequel avoit chassé les Novatiens d'Alexandrie, ainsi que nous avons veu: de sorte qu'il ne faut pas estonner s'il reprend souvent sainct Cyrille d'orgueil, & de trop grande presomption, & quelquesfois de crime (vol.I, p.785)."

Baronius n’exprime pas son opinion explicitement, bien qu’il dise qu’elle fut accusée d’avoir corrompu Oreste. Son opinion tente plutôt de blâmer l’attitude de Socrate le Scolastique qu’il juge quelque peu excessive à l’encontre de Cyrille. Bien qu’il fasse ici état de la renommée philosophique d’Hypatie comme une sorte d’hommage à un confrère penseur.

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